Bon, je vais en parler. De mes INVISALIGN. Je me suis fait poser des Invisalign en septembre dernier et plus qu'un besoin de perfection, c'est une action courageuse que j'ai porté envers mes désirs. Courageuse pour moi. Je viens d'un milieu où on prône le naturel. Où de modifier son corps, autre que par des piercings et des tattoos, signifie qu'on ne s'aime pas tel que l'on est et qu'on participe au capitalisssss superficiellllll. Ironique quand même, de supposer que quelqu'un ne s'aime pas et la rabaisser du même coup. Et j'ai endossé cette vision pendant longtemps. Une partie de moi avaient des désirs et l'autre en avait honte et donc l'étouffait et la camouflait. Mais j'ai appris avec le temps que ce que l'on résiste persiste. Il faut s'ouvrir pour évoluer. Et donc j'ai eu le temps d'affiner ma pensée avant d'agir impulsivement. Parce que les changements sur le corps sont permanents. Et bien que l'adroitissement des dents n'est pas vu comme une chirurgie esthétique, il s'agit bel et bien d'une modification dans le but de se rapprocher d'un type de beauté. Et qu'on impose à des mineur.es ;) .
Bref. Je me suis sentie coupable de songer à avoir des Invisalign. Parce que c'est un acte de privilégié.es. C'est esthétique et c'est aussi coûteux. Mais qui dit esthétique dit aussi mental. Et je ne fais pas partie des riches. J'ai trouvé un bon deal, j'ai fait des paiements par mois, amoindris mes ressources financières. Alors voilà. Je voulais les dents droites. Plus droites. Ralentir le crochissement de mes dents (yes it is a thing). Je savais que je recevrais des : ''Hein, mais t'avais déjà les dents droites ?! Tu dépenses combien pour ça !?'' Tout le monde y va de sa propre perception de la valeur de l'argent et du choix. Alors qu'un voyage se transforme en souvenir (dont on oubli des bouts avec le temps), des études se transforment en diplôme, en connaissances et opportunités de travail (certaines connaissances s'oublient et on fait souvent un travail différent qu'on avait prévu). Au fond, l'idée est qu'on apprend à se connaître dans le processus. N'est-ce pas le but de la vie ? Tout cela est une question d'expériences qui s'échappent ou se sédimentent dans notre corps. On paie pour des expériences. Quand on dit que le processus est aussi important que le résultat, voir plus, c'est vrai.
Voici donc un résumé de ce à quoi s'attendre quand on obtient ses Invisalign :
D'abord la surprise. Ah oui. On te les vend vraiment comme invisibles. Mais c'est pas mal moins invisible qu'on pense. Entre autre parce qu'on a des énormes attaches collées sur nos dents (tout dépendant de ton dentiste et de ta dentition), dans mon cas les palettes (ou 11,21 en langage de dentiste). Pas tout à fait invisible, mais pas SI évident non plus. Donc les gens fixent plus longtemps que d'usage ta bouche et tes dents quand tu parles, avec des allers-retours sur tes yeux pour ne pas paraître rude (mais encore ça dépend des gens), essayant de comprendre c'est quoi. Quand tu travailles au service à la clientèle, c'est... intéressant.
Par contre, dès que tu connais le moindrement la personne, ta bouche deviens du domaine public. Et là tu rencontres très franchement ce qu'on appelle : Les opinions :) . Tout y passe : Le prix, le choix, la légitimité, la comparaison, l'apparence... J'ose, par ce que j'ai entendu, comparer ça à une femme enceinte. Ta bédaine, visible, devient du domaine publique. Pis des fois t'as comme pas le goût de parler de ça. T'essaie juste de passer à travers tes chevilles enflées pis ton mal de cœur pis ta fatigue constante, pis tel dossier à ta job pis ta relation avec tes beaux-parents pis le fait que tu procrastines tes projets pis tu te dis que c'est ça être maman pis que ta vie est fini pis tu capotes (mettons). Les personnes qui font le plus de bien sont celles qui en ont déjà eues (des Invisalign. Pour ce qui est des enfants, je crois que c'est une toute autre histoire !). Des inconnu.es qui sont enthousiastes de t'en parler. They know. Te parlent des douleurs. Et ils te renvoient un sourire droit et éclatant, contents de plus en être là et te donnant a little glimpse de ce à quoi ressemble la lumière au bout du tunnel. Ces gens aident à voir le boutte. Enfin. Mais le boutte, on va en reparler.
Pour ce qui est de la sensation de porter des Invisalign. On les sent comme si elles prenaient tout l'espace de ta bouche. Pis alors que tu pensais pouvoir les enlever à ta guise, on veut que tu les portes 22h sur 24h pis qu'idéalement tu les porte en mangeant. Ça ressemble à quoi, tu te demandes, de manger avec des Invisalign ? À faire l'amour avec un condom... en plastique rigide. Quelques heures après me les être fait poser, je me suis dit, ça se peut pas. Et j'ai pensé tout abandonner. Je me suis imaginé appeler le dentiste et dire ''Ouin finalement non. Je peux pas. Je sais j'ai signé un contrat de paiement, je vais continuer à payer, je m'en fout, fait juste m'enlever cet engin de torture je les ADORE mes dents finalement !'' J'étais claustrophobe dans mon propre corps, ma propre bouche. Dépendante d'un dentiste pour plusieurs mois. Je me suis imaginée dans un monde apocalyptique, prise avec des attaches sur les dents forever. Puis je me suis parlée.
Le sommeil ? Honnêtement ça allait. Avec des Advil pour la douleur. Même que j'ai fini par tellement détester mes journées avec des Invisalign que j'avais hâte d'aller dormir pour ne plus les sentir et pour me dire que j'avais 9h de moins à les porter. Oui, c'était à ce point. Mon seul plaisir était de voir la pile d'Invisalign descendre. (Parce qu'il te donnent d'avance un certain nombre d'Invisalign à changer chaque semaine).
Niveau confiance en soi, je me suis trouvée laide. Mal à l'aise face à mon chum. Les baisers moins agréables. Et encore, presqu'un an plus tard, je dois encore porter des Invisalign la nuit parce qu'ils restent un petit ajustement avant de coller le fil derrière et je me sens comme Darla dans Nemo quand je souhaite bonne nuit à mon chum.
Pour ce qui est du progrès qu'on voit sur nos dents ? Malheureusement, je trouvais que ça ne bougeait pas assez vite. Et je me disais : Wow. Toute la torture que je m'impose. J'ai mal à la tête mal aux dents, j'ai peur que mes dents se déchaussent, et ça a bougé d'un centième de quart de millimètre. Je m'en sortirai jamais.
Mais yeah. Abondance. Je suis riche, j'ai des désirs je les accomplis.
Mais au fond, tu développes la résilience. Tu te surprends à comparer le début à où tu en es. Tu développes des skills de calcul en les portant vraiment 24h sur 24h pour te permettre de moins les porter une journée. Tu es fière de voir les paiements passer, le travail qui se fait lentement mais sûrement. Mais j'était surtout fière de voir que j'avais pris action envers mon désir. J'aurais passé à vie à me demander ce que ça fait si je ne l'avais pas fait.
Et maintenant le boutte. J'avais signer avec ce dentiste parce que c'était moins long et moins chers que ce qu'on m'avait dit ailleurs. J'ai fini les paiements, c'est effectivement moitié moins cher, mais finalement plus long que prévu. Les rendez-vous sont difficiles à avoir, donc cela fait presqu'un an et je porte une paire d'Invisalign la nuit en attendant mon prochain rendez-vous (elles jaunissent et je hais les nettoyer). On a commencé à me coller un fil derrière, mais mes dents ne sont pas encore tout à fait droites alors il est à moitié collé. Un bout de colle s'est détaché d'une des pointes et donc je me suis blessé la langue et la lèvre inférieure dessus. Je me lève le matin avec les dents droites et elles recrochissent au courant de la journée. Et mes dents n'ont pas le look que j'imaginais... ce n'est pas exactement comme je pensais. Je trouve ça à la fois pareil et....
Comme tout, on s'habitue. C'est pas vraiment comme je l'imaginais. Pis je le dirai pas trop fort, mais quand mon chum me disait que mes dents croches avaient un certain charme... ben je suis un tit peu d'accord finalement... Mais est-ce que j'embarquerais à nouveau dans l'aventure ? ... oui. La vie est pleine de contraste et de paradoxe !
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